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20 juillet 2006 4 20 /07 /juillet /2006 16:44



A l'origine chant de guerre révolutionnaire et hymne à la liberté, la Marseillaise s'est imposée progressivement comme un hymne national. Elle accompagne aujourd'hui la plupart des manifestations officielles.


L'histoire


En 1792, à la suite de la déclaration de guerre du Roi à l'Autriche, un officier français en poste à Strasbourg, Rouget de Lisle compose, dans la nuit du 25 au 26 avril, chez Dietrich, le maire de la ville, le "Chant de guerre pour l'armée du Rhin".

Ce chant est repris par les fédérés de Marseille participant à l'insurrection des Tuileries le 10 août 1792. Son succès est tel qu'il est déclaré chant national le 14 juillet 1795.


 

Illustration : Marche des Marseillois chantée sur diferans theatres - Paris, Frère; Londres, W. Holland, 1792 Interdite sous l'Empire et la Restauration, la Marseillaise est remise à l'honneur lors de la Révolution de 1830 et Berlioz en élabore une orchestration qu'il dédie à Rouget de Lisle.

La IIIème République (1879) en fait un hymne national et, en 1887, une "version officielle" est adoptée par le ministère de la guerre après avis d'une commission.

C'est également sous la IIIème République, le 14 juillet 1915, que les cendres de Rouget de Lisle sont transférées aux Invalides.

En septembre 1944, une circulaire du ministère de l'Education nationale préconise de faire chanter la Marseillaise dans les écoles pour "célébrer notre libération et nos martyrs".

Le caractère d'hymne national est à nouveau affirmé dans les constitutions de 1946 et de 1958 (article 2).


 


L'auteur


Illustration : Couverture d'une partition de la Marseillaise. Paris, Bonoldi, vers 1840 Né en 1760 à Lons-le-Saunier, Claude-Joseph Rouget de Lisle est capitaine du génie mais a mené une carrière militaire assez brève. Révolutionnaire modéré, il est sauvé de la Terreur grâce au succès de son chant. Auteur de quelques romances et opéras, il vit dans l'ombre sous l'Empire et la Restauration jusqu'à son décès à Choisy-le-Roi en 1836.


 


La partition


En quelques semaines, l' "Hymne des Marseillais" est diffusé en Alsace, sous une forme manuscrite ou imprimée, puis il est repris par de nombreux éditeurs parisiens. Le caractère anonyme des premières éditions a pu faire douter que Rouget de Lisle, compositeur par ailleurs plutôt médiocre, en ait été réellement l'auteur.

Illustration : Extraits d'une partition de la Marseillaise Il n'existe pas de version unique de la Marseillaise qui, dès le début, a été mise en musique sous diverses formes, avec ou sans chant. Ainsi, en 1879, la Marseillaise est déclarée hymne officiel sans que l'on précise la version, et un grand désordre musical pouvait se produire lorsque des formations différentes étaient réunies.

La commission de 1887, composée de musiciens professionnels, a déterminé une version officielle après avoir remanié le texte mélodique et l'harmonie.

Le Président Valéry Giscard d'Estaing a souhaité que l'on revienne à une exécution plus proche des origines de l'oeuvre et en a fait ralentir le rythme. C'est aujourd'hui une adaptation de la version de 1887 qui est jouée dans les cérémonies officielles.

Parallèlement, la Marseillaise a été adaptée par des musiciens de variété ou de jazz.


 


Les paroles


1er couplet

Allons enfants de la Patrie,
Le jour de gloire est arrivé !
Contre nous de la tyrannie,
L'étendard sanglant est levé, (bis)
Entendez-vous dans les campagnes
Mugir ces féroces soldats ?
Ils viennent jusque dans vos bras
Egorger vos fils, vos compagnes !


Refrain :

Aux armes, citoyens,
Formez vos bataillons,
Marchons, marchons !
Qu'un sang impur
Abreuve nos sillons !

2

Que veut cette horde d'esclaves,
De traîtres, de rois conjurés ?
Pour qui ces ignobles entraves,
Ces fers dès longtemps préparés ? (bis)
Français, pour nous, ah ! quel outrage
Quels transports il doit exciter !
C'est nous qu'on ose méditer
De rendre à l'antique esclavage !

3

Quoi ! des cohortes étrangères
Feraient la loi dans nos foyers !
Quoi ! ces phalanges mercenaires
Terrasseraient nos fiers guerriers ! (bis)
Grand Dieu ! par des mains enchaînées
Nos fronts sous le joug se ploieraient
De vils despotes deviendraient
Les maîtres de nos destinées !

4

Tremblez, tyrans et vous perfides
L'opprobre de tous les partis,
Tremblez ! vos projets parricides
Vont enfin recevoir leurs prix ! (bis)
Tout est soldat pour vous combattre,
S'ils tombent, nos jeunes héros,
La terre en produit de nouveaux,
Contre vous tout prets à se battre !

5

Français, en guerriers magnanimes,
Portez ou retenez vos coups !
Epargnez ces tristes victimes,
A regret s'armant contre nous. (bis)
Mais ces despotes sanguinaires,
Mais ces complices de Bouillé,
Tous ces tigres qui, sans pitié,
Déchirent le sein de leur mère !

6

Amour sacré de la Patrie,
Conduis, soutiens nos bras vengeurs
Liberté, Liberté chérie,
Combats avec tes défenseurs ! (bis)
Sous nos drapeaux que la victoire
Accoure à tes mâles accents,
Que tes ennemis expirants
Voient ton triomphe et notre gloire !

7

Nous entrerons dans la carrière
Quand nos aînés n'y seront plus,
Nous y trouverons leur poussière
Et la trace de leurs vertus (bis)
Bien moins jaloux de leur survivre
Que de partager leur cercueil,
Nous aurons le sublime orgueil
De les venger ou de les suivre

NB: le septième couplet, dont l'auteur reste à ce jour inconnu, a été ajouté en 1792.


Source
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25 mars 2006 6 25 /03 /mars /2006 17:22

L'origine du croissant

[...] En tant que pâtisserie, le croissant désigne un petit pain en pâte levée ou feuilletée, abaissée en triangle, roulée et incurvée en forme de croissant de lune.

L'origine de cet article de viennoiserie remonte à l'époque où les Turcs assiégeaient la capitale de l'Autriche (1683). Une nuit, les boulangers de Vienne entendirent le bruit de sape des ennemis, et ils donnèrent l'alarme, repoussant l'assaut de l'ennemi. Les Ottomans sont vaincus grâce aux 25.000 hommes envoyés en renfort par Jean III Sobieski, roi de Pologne. Pour récompenser les boulangers, le souverain leur accorde le privilège de fabriquer une pâtisserie qui immortalisera l'événement. C'est ainsi que naît le Hörnchen, 'petite corne' en allemand, allusion au croissant qui orne l'étendard turc.

Une autre tradition attribue l'invention du croissant à un certain Kolschitski, cafetier viennois, d'origine polonaise. En récompense de son courage pendant le siège, il aurait reçu des sacs de café pris à l'ennemi. Il aurait alors eu l'idée de servir ce café accompagné d'une pâtisserie en forme de croissant. Marie-Antoinette, arrivant d'Autriche, introduit ce délicieux croissant à la cour de France en 1770.

Les croissants étaient, à l'origine, en pâte à pain améliorée. Aujourd'hui, ils adoptent parfois une forme allongée. On peut les servir en hors-d'oeuvre chauds, farcis de jambon, de fromage, de champignons. On appelle également 'croissant' un petit four en pâte d'amande, garni de pignons ou d'amandes effilées en demi-cercle. [...]

http://www.omarlecheri.net/ency/croissant.htm


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10 mars 2006 5 10 /03 /mars /2006 04:17

Olivier Pétré-Grenouilleau, Professeur à l’université de Bretagne-Sud (Lorient)



On l’ignore totalement : au XVIe siècle, les esclaves blancs razziés par les musulmans furent plus nombreux que les Africains déportés aux Amériques. L’historien américain Robert C. Davis restitue les pénibles conditions de vie de ces captifs italiens ou espagnols*.

On a pris aujourd’hui la mesure de la traite des esclaves noirs organisée par les négriers musulmans à travers le Sahara, ainsi qu’en direction du Moyen-Orient et des régions de l’océan Indien (1). On sait aussi que l’affrontement entre l’islam et la chrétienté a alimenté en maures et en chrétiens les marchés d’esclaves des deux côtés de la Méditerranée médiévale.
Mais si des travaux, maintenant assez nombreux, avaient permis d’éclairer la question de l’esclavage dans les pays chrétiens, et notamment dans la péninsule Ibérique, on ne savait pas grand-chose de la condition réelle des esclaves chrétiens dans les États “ barbaresques ” d’Afrique du Nord. Une histoire souvent obscurcie par la légende.
Professeur d’histoire sociale italienne à l’université d’État de l’Ohio, Robert C. Davis nous en livre désormais, dans un ouvrage remarquable, une approche véritablement scientifique. Le fruit de dix ans de travail, principalement en Italie.
Car l’Italie, “ œil de la chrétienté ”, fut sans aucun doute, entre le XVIe et le XVIIIe siècle, la région la plus touchée par les raids des Barbaresques, ou Africains du Nord. Des villages y furent sinistrés, des activités (comme la pêche) entravées, des esprits et des sociétés durablement secoués. La Méditerranée devenant “ la mer de la peur ”, nombre d’Italiens auraient alors délaissé les littoraux pour s’installer plus loin, vers l’intérieur. A propos des effets à long terme de ces razzias, l’auteur va jusqu’à parler de “ désastre social et psychologique ” – une question qui mériterait sans doute des études plus étoffées.

Un million d’esclaves entre 1530 et 1780

Les causes de l’esclavage des chrétiens sont tour à tour mentionnées par Robert C. Davis : la Reconquista, le désir, de la part des musulmans, de prendre une revanche sur les croisades, l’appât du gain. Mais ce qui l’intéresse, c’est surtout la question des conditions de vie de ces esclaves. Une question qui fut l’un des thèmes porteurs de l’historiographie consacrée à l’esclavage américain, et que Robert C. Davis tente d’appliquer, ici, à l’esclavage musulman.
Difficile d’estimer le nombre des esclaves blancs dans les pays barbaresques. On ne dispose que de données partielles, d’époques différentes, qu’il faut recouper avec soin. Parfois même se contenter de projections.
Contre Fernand Braudel, qui en avait minimisé l’ampleur (2), tout ce travail conduit l’auteur à une nouvelle pesée du phénomène. Estimant à environ 15 % le taux de mortalité des esclaves déjà plus ou moins acclimatés à leur nouvelle condition, il évalue entre un million et 1250000 le nombre d’esclaves blancs détenus, entre 1530 et 1780, sur un territoire s’étendant de l’Algérie à la Libye actuelles. Au XVIe siècle, il y avait donc annuellement plus d’esclaves blancs razziés que d’Africains déportés aux Amériques.
90 % au moins de ces esclaves blancs étaient des hommes. Et comme on ne leur laissa guère l’occasion, de fait, d’avoir une descendance, la seule chose d’eux qui aurait pu leur survivre est le produit de leur travail, du moins pour ceux qui étaient affectés à de grandes tâches étatiques : construction de digues, de fortifications, de ports, de rues ou encore de palais. Mais une bonne partie de ces constructions a disparu. Cette institution, qui dura pourtant près de trois siècles, n’a donc laissé pratiquement aucune trace perceptible. “ L’autre esclavage ”, écrit Robert C. Davis, est ainsi devenu “ l’invisible esclavage ”.
Au XVIe siècle, de vastes opérations militaires étaient menées par les États barbaresques, jusqu’à l’intérieur des terres ennemies pour se procurer des esclaves. Mais, à partir des premières décennies du XVIIe siècle, les captifs blancs furent surtout le produit d’opérations corsaires privées. La valeur des esclaves pouvait représenter entre 20 et 100 % de celle des autres prises, navire et marchandises inclus. Aussi les Barbaresques s’occupaient-ils directement, non seulement de capturer les esclaves, mais aussi de les transporter et de les vendre.
L’appât du gain était renforcé par l’arrière-plan conflictuel entre chrétienté et islam. Sinon, comment comprendre l’horreur toute particulière que les cloches des églises des villages qu’ils razziaient inspiraient aux corsaires – dont certains étaient des chrétiens renégats ? Des cloches qu’ils déposaient souvent, et parfois emportaient avec eux – le bronze n’étant pas sans valeur. La violence exercée lors de ces raids avait également une tonalité en partie symbolique qui permettait d’entretenir la crainte des populations littorales.
Même chose pour les humiliations infligées dès leur capture aux nouveaux esclaves : obligation de se dénuder, administration de coups à l’aide de cordes à nœuds, puis, à leur arrivée à bon port, défilé des nouveaux asservis destiné à officialiser le triomphe de leurs nouveaux maîtres. Ainsi désocialisés, les esclaves étaient plus facilement soumis.
D’abord un peu mieux traités, afin qu’ils s’acclimatent correctement, ils étaient ensuite orientés vers des activités variées, allant du travail dans les orangeraies de Tunis au service domestique. Néanmoins, la plupart se voyaient confier des tâches particulièrement dures : galères, extraction et convoyage de pierres, construction, etc. Et aucun “ code blanc ” (à l’imitation du fameux code noir appliqué dans les Antilles françaises), même symbolique, ne venait limiter le pouvoir du maître sur son esclave “ infidèle ”.
Certains captifs jouissaient cependant d’un certain degré de liberté On leur demandait seulement de ramener, chaque matin, une certaine somme d’argent à leur maître ; système rappelant celui, dans les Antilles, des “ nègres à talents ” loués à des entrepreneurs. Le vol pouvait alors être à la fois acte de résistance et moyen de survivre au sein du système esclavagiste.

Cervantès captif des Barbaresques

Souvent, les esclaves chrétiens travaillaient comme domestiques au service de familles musulmanes. Mais ce type d’esclavage déclina plus rapidement que celui organisé au bénéfice des États barbaresques. Au point que, à la fin du XVIIIe siècle, la moitié des esclaves chrétiens d’Alger vivaient dans des bagnes publics. Les conditions d’existence y étaient extrêmement dures : il y régnait un climat de violence, notamment sexuelle, les geôliers étant accusés d’y favoriser, contre paiement, des pratiques sodomites.
Les captifs qui pouvaient faire l’objet d’une forte rançon échappaient vite à ces conditions d’existence. D’autres pouvaient être rachetés au bout de quelques années. Ce qui fut le cas de Miguel de Cervantès (1547-1616), l’auteur de Don Quichotte, esclave des Barbaresques entre 1571 et 1580. La chose devint théoriquement plus facile avec le temps, car des institutions religieuses spécialisées dans le rachat des captifs furent organisées de l’autre côté de la Méditerranée ; en Italie, des sommes importantes furent mobilisées pour le paiement des esclaves chrétiens.
La durée de captivité s’étendait ainsi, dans nombre de cas, de cinq à douze ans au maximum. Le taux de mortalité, cependant, demeurait élevé. Beaucoup d’esclaves n’avaient donc que peu d’espoir de retourner, un jour, chez eux.
O. P.-G.

Notes
* Robert C. Davis, Christian Slaves, Muslim Masters. White Slavery In The Mediterranean, The Barbary Coast And Italy, 1500-1800, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2003.
1. Cf. “ La vérité sur l’esclavage ”, spécial, L’Histoire n° 280.
2. La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II, Paris, Armand Colin, 9e éd., 1990

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5 mars 2006 7 05 /03 /mars /2006 12:06

La peur du diable


Charlemagne contre le diabolisme saxon



Pour justifier la conquête de la Saxe, le roi des Francs invoque une raison religieuse : la lutte contre le culte des démons. Mais les Saxons ne se laissent pas christianiser sans résister.



Par Bruno Dumézil


Eginhard, le biographe de Charlemagne, est catégorique : la Saxe, infestée par les cultes diaboliques, mérite d'être écrasée par les armées franques et convertie à la véritable religion, celle du Christ. « Les Saxons, comme à peu près toutes les nations établies en Germanie, sont bien connus pour être d'une nature féroce, pour s'adonner au culte des démons, pour s'opposer à notre religion et pour ne pas juger déshonnête de violer et de transgresser les lois divines et humaines. [...] Les Francs finirent par en être à ce point irrités que, jugeant insuffisant de rendre les coups, ils estimèrent qu'il était nécessaire d'entreprendre contre eux une guerre ouverte », écrit-il.

 

La guerre que mène Charlemagne en Saxe ne ressemble pourtant en rien à une guerre de religion. C'est une pure opération de conquête, longue, difficile et progressive. Les tribus saxonnes, installées dans un vaste territoire entre le Rhin moyen et la vallée de l'Elbe, résistent pendant longtemps aux armées franques. Débutée en 772, la guerre ne s'achève qu'en 804. La résistance opiniâtre des Saxons est bien sûr favorisée par leur connaissance du terrain. Mais leur volonté d'indépendance s'ancre avant tout sur l'adhésion au paganisme germanique.

 

Les Saxons vénèrent de nombreux dieux, proches de ceux du panthéon scandinave. Ils rendent également un culte aux éléments naturels : arbres, sources, rochers... En Saxe, on croit aussi à l'existence des stryges et des esprits peuplant certains lieux. Les Saxons n'ont pas de clergé à proprement parler, mais certains individus, surtout les chefs, bénéficient de contacts privilégiés avec la sphère du sacré. A ce titre, ils dirigent les sacrifices et lisent les signes envoyés par les dieux. Il existe de grands sanctuaires fédéraux, où les tribus rendent un culte. Ces lieux jouent un rôle important dans la cohésion politique. C'est le cas de l'Irminsul, un arbre sacré considéré comme un pilier reliant le ciel et la terre.

 

Les habitants de l'ancienne Germanie semblent avoir été très tôt de farouches défenseurs de leur religion face aux progrès du christianisme. Au tout début du VIIIe siècle, deux missionnaires anglo-saxons qui cherchent à convertir un chef saxon sont massacrés par une foule en colère. Dès les années 730, la religion germanique devint le catalyseur de la résistance saxonne face à la pénétration culturelle franque. Lorsque la guerre commence, Charlemagne comprend très vite qu'il lui faut briser le paganisme saxon s'il veut durablement intégrer à son royaume les régions conquises.

 

Cette volonté politique du roi franc s'accorde d'ailleurs probablement avec ses convictions religieuses. Pour le christianisme antique et médiéval, les multiples divinités du paganisme constituent un sujet de scandale. Jadis, les Pères de l'Eglise avaient élaboré différents raisonnements pour contester le polythéisme de l'Empire romain. Certains avaient affirmé que les dieux étaient un pur produit de l'imagination des hommes. D'autres expliquaient qu'il s'agissait de rois des temps anciens, à qui un peuple crédule avait rendu un culte. Mais la plupart des théologiens pensaient que les divinités païennes étaient en fait des démons envoyés par le diable pour tromper les hommes. C'est cette dernière interprétation que Charlemagne décide d'adopter pour lutter contre la religion saxonne. Il commence donc par détruire systématiquement tous les objets du culte « démoniaque ». L'Irminsul est ainsi solennellement abattu en 772. Mais la meilleure façon de chasser le diable de Saxe reste de convertir tous les Saxons au christianisme. Le roi des Francs édicte vers 785 un capitulaire qui condamne à mort tout homme adulte qui refuserait le baptême. Les parents doivent faire baptiser leurs enfants avant l'âge d'un an, sous peine d'une amende écrasante.

 

Le hasard a voulu que l'on ait conservé le rituel destiné au baptême des Saxons. On y voit le prêtre interroger le candidat au baptême : « Forsachistu diobolae ? » (« Renonces-tu au diable ? ») Le Saxon doit répondre : « Ec forsacho diabolae. » (« Je renonce au diable. ») Le prêtre lui demande ensuite de renoncer aux démons : « Thunaer ende Woden ende Saxnote » , c'est-à-dire aux dieux Donnar, Wotan et Saxnot, ce dernier étant la divinité tutélaire de la Saxe. La première victime de la campagne de baptêmes forcés est naturellement la classe dirigeante, celle qui a le plus de rapports avec les dieux païens, et donc avec le diable. En 785, Charlemagne oblige notamment Widuking, le chef de la résistance saxonne, à recevoir le baptême.

 

Une fois les populations converties, Charlemagne continue de surveiller les pratiques religieuses de ses nouveaux sujets. Il est interdit, sous peine de mort, de « sacrifier aux démons », c'est-à-dire de procéder aux offrandes traditionnelles aux divinités païennes. Les Saxons ne peuvent non plus faire de voeux sur les arbres ou les sources. Après avoir lutté contre Satan, on lutte maintenant contre ses pompes et ses oeuvres. Charlemagne va plus loin en interdisant totalement l'incinération des défunts. L'Eglise, pourtant, n'avait jamais légiféré sur le sujet. Saint Augustin lui-même considérait que toute pratique funéraire était valable, car Dieu saurait parfaitement reconstituer les corps le jour de la Résurrection de la Chair. Mais puisque l'incinération est une pratique saxonne, Charlemagne la juge sacrilège. Les tertres où l'on dépose les cendres des défunts sont tenus pour des lieux démoniaques, et ils doivent être abandonnés au profit des cimetières chrétiens.

 

Le paganisme saxon ne résiste pas à cet assaut législatif. Les comtes francs font impitoyablement appliquer la loi en terrain conquis, et les évêques peuvent facilement imposer la nouvelle religion. Le diable ne cessera pourtant pas d'exister en Saxe. Mais désormais, comme tout le monde, il est devenu chrétien.

 

Maître de conférence à Paris X-Nanterre, Normalien, agrégé d'histoire, Bruno Dumézil est l'auteur de Conversion et Liberté dans les royaumes barbares. Ve-VIIIe siècles (Fayard, 2005).

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12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 14:51

ECLAIRAGES

Le Temps I Article

Comment l'Europe est devenue chrétienne

Un nouvel essai explique le lent processus de christianisation des peuples germaniques.

Patricia Briel

Jeudi 19 janvier 2006

Au Ve siècle de notre ère, les peuples germaniques païens qui peuplaient le nord-ouest de l'Europe se sont rendus maîtres de l'Empire romain. Entre le Ve et le VIIe siècles, les vainqueurs de la puissance romaine ont cependant adopté la religion officielle des vaincus, le christianisme. Phénomène paradoxal. En effet, au début du Ve siècle, les populations de l'Empire n'étaient que superficiellement christianisées. En 476, date qui marque le passage définitif de l'Occident sous la domination des rois barbares, aucun de ces derniers n'était encore catholique. La pérennité du christianisme reposait alors uniquement sur des évêques ne disposant pas de forces armées pour convertir les populations. Dès lors, comment l'Europe est-elle devenue chrétienne en l'espace de deux siècles?

Dans un ouvrage magistral, l'historien français Bruno Dumézil, maître de conférence en histoire médiévale à l'Université de Paris-X, explique le lent processus qui a conduit les rois germaniques et leurs sujets vers le baptême. L'enquête minutieuse et nuancée de l'historien permet de comprendre que le christianisme n'a pas été imposé par la force en Occident, mais par des stratégies de conversion subtilement coercitives. En effet, l'idéologie de «guerre sainte» n'est apparue qu'à la fin du IXe siècle, et la pensée chrétienne a longtemps interdit la conquête à des fins évangélisatrices.

Saint Augustin avait certes théorisé la notion de «guerre juste», mais celle-ci n'était envisageable qu'à titre défensif. Entre les Ve et VIIe siècles, c'est donc une contrainte religieuse non violente qui a imposé le christianisme dans les anciennes provinces occidentales de l'Empire romain. Cette contrainte a pris des formes économiques, sociales et culturelles, poussant les païens et les hérétiques qui refusaient le baptême aux marges de la civilisation romaine. Le livre de Bruno Dumézil fera certainement date dans l'historiographie de la conversion des royaumes barbares, car il restitue très finement toute la complexité du passage de l'Occident médiéval au christianisme.

Bien que récusant l'usage de la force, contraire à la foi chrétienne, les évêques du Haut Moyen Age étaient les héritiers d'une tradition coercitive. Durant l'Antiquité tardive, les empereurs romains avaient imposé le christianisme à coups de décrets, sans toutefois lancer de persécutions. Les cultes païens furent interdits en 392, et de nombreux temples détruits. Des moines et des évêques n'hésitèrent pas à faire usage de la violence pour obtenir la conversion des païens. Mais les empereurs préféraient promouvoir l'adhésion à la religion d'Etat par des mesures favorisant les individus qui se convertissaient. Quant à ceux qui refusaient le baptême, ils étaient progressivement exclus de toute vie sociale et tenus aux marges de la civilisation romaine. Ces politiques civiles de coercition s'appliquaient également aux hérétiques.

A la fin du IVe siècle, la foi chrétienne était devenue un signe de prestige social et un élément indispensable pour faire carrière dans l'Empire. «La conversion devenait une quasi-obligation pour tous ceux qui entendaient conserver ou améliorer leur position sociale en entrant au service de l'empereur», remarque l'auteur. C'était l'empereur qui définissait le contenu de la religion, même s'il était conseillé par les évêques. Dans ce contexte, la hiérarchie ecclésiastique, trop heureuse de la conversion de l'Empire, approuvait le plus souvent les mesures de coercition impériales. Ainsi saint Augustin, qui voyait dans la contrainte religieuse une manifestation de l'amour divin.

Après l'effondrement de l'Empire, les évêques se retrouvent seuls à assumer l'impératif de l'évangélisation. Le paganisme n'a pas disparu, et de nombreux foyers hérétiques subsistent encore. De plus, ils ont la tâche d'évangéliser les populations germaniques. Dans le vide des institutions civiles, les évêques deviennent peu à peu les premiers personnages de leurs villes respectives, tant en termes de prestige que de pouvoirs réels. Ils sont ainsi en mesure de marginaliser les non-chrétiens. Cependant, l'interdiction légale du paganisme ne semble pas avoir été maintenue, et les politiques civiles de coercition ont disparu après la chute de l'Empire. Dans la plupart des cas, les évêques ont d'ailleurs préféré compter sur la prédication pour amener de nouvelles âmes au christianisme, et condamné l'usage de la force.

Un pape comme Grégoire le Grand (590-604) voyait dans les conversions forcées une faillite de la pastorale et s'opposait vigoureusement à l'usage de la contrainte. L'expression du libre choix était alors jugée très importante dans la demande de baptême, ce qui n'empêcha pas les évêques de mettre en place une culture de la conversion. Leur position de chefs de la cité permit aux prélats de favoriser la christianisation des élites romaines. Pour ces dernières, «la religion chrétienne était un moyen de conserver un peu de l'ancien prestige social, mis à mal par la perte de puissance politique et de richesse foncière consécutive aux occupations barbares», écrit l'auteur.

Si, à l'est de l'Empire, le paganisme resta longtemps le signe d'un haut niveau culturel, à l'ouest, c'est l'adhésion au christianisme qui conférait un statut social élevé. Pour se démarquer des populations barbares, l'aristocratie romaine n'avait d'autre choix que d'intégrer l'élite chrétienne et donc passer par la conversion. Le paganisme devint dès lors synonyme de médiocrité.

De manière générale, les chrétiens ne cherchèrent pas à convertir les juifs. Pour saint Augustin, il était clair que ces derniers ne devaient pas disparaître avant la fin des temps, car leur état de soumission était le signe de la punition de leur déicide. Certains évêques, comme Avit de Clermont, tentèrent cependant d'obtenir leur conversion en leur laissant le choix entre le baptême et l'exil. Le pape Grégoire le Grand condamna cependant l'usage de méthodes coercitives. Comme le remarque Bruno Dumézil, «les cas de conversions forcées de juifs organisées par des évêques restent rares dans l'Occident barbare.» Pour Grégoire le Grand, le judaïsme était ainsi un culte légal, même si sa doctrine était à ses yeux erronée.

Comment les évêques réussirent-ils à convertir les barbares? Ils durent affronter à la fois le paganisme germanique et l'arianisme, une hérésie chrétienne qui fut pourtant la religion officielle de l'Empire entre 360 et 380. L'arianisme, qui considérait le Fils comme nettement inférieur au Père au sein de la Trinité, était devenu la religion des Goths avant d'être rejeté définitivement par un concile. Les évêques élaborèrent une stratégie de conversion par le haut. En baptisant le roi barbare et son entourage, ces héritiers du modèle constantinien pensaient que le christianisme se diffuserait naturellement vers le peuple. Ils n'avaient pas imaginé que les sujets germaniques puissent se rebeller contre le choix du roi.

Ce dernier prenait toujours un risque en se convertissant. Car changer de religion revenait à rejeter les ancêtres qui avaient fondé la lignée sacrée dont était issu le roi. Or, perdre le contact avec les ancêtres pouvait signifier s'aliéner les pouvoirs positifs des puissances surnaturelles. La responsabilité sacrale du roi limitait donc singulièrement sa liberté. «Tout-puissant tant qu'il demeurait un gestionnaire du sacré, il se voyait inquiété voire menacé lorsqu'il entendait apporter des modifications au lien entre le peuple et ses dieux. Toute rupture avec les rites ancestraux inquiétait les sujets et menaçait en conséquence le souverain», écrit Bruno Dumézil.

De plus, en recevant le baptême, le roi perdait ses prérogatives sacrales au profit des évêques chrétiens. Il abandonnait son rôle de chef religieux. Pour accepter un tel contrat, le roi devait gagner d'autres compétences, et la confiance de son peuple. «Le souverain germanique ne se voyait en effet reconnaître le pouvoir de modifier le sacré que dans le sens d'une amélioration, de l'obtention d'un surcroît d'efficacité magique de sa personne, dont ses sujets bénéficieraient de façon immédiate et tangible», observe l'historien. Les victoires guerrières et la prospérité constituaient les principaux signes de l'efficacité d'une religion. Le roi convaincu par le christianisme usait de beaucoup de prudence avant de changer officiellement la religion de son royaume. Il se convertissait discrètement, puis observait les résultats économiques et militaires. S'ils étaient satisfaisants, le roi se lançait alors dans une politique officielle de conversion de ses sujets.

«Les choix religieux dépendaient donc pour partie de la conjoncture politico-économique, et surtout de sa perception par les sujets», remarque l'auteur. Mais tout changement de religion devait être avalisé par une assemblée décisionnelle qui représentait le peuple. Celle-ci pouvait aller à l'encontre des préférences du roi. Ainsi, au début du VIIe siècle, l'aristocratie et la reine du royaume d'East Anglia refusèrent que le roi Raedwald abandonne le culte des idoles. Ce dernier fut donc contraint de maintenir le paganisme comme religion d'Etat.

Dans certains cas, le passage au christianisme n'avait rien de définitif. «Pour les peuples germaniques, le culte du Dieu unique ne constituait, osons le dire, qu'un contrat avec le sacré, pacte révocable ou renégociable en cas d'absence de résultat. [...] Les acteurs de l'assemblée qui avaient opté en faveur de la conversion pouvaient à tout instant changer de décision.» Le christianisme ne fut adopté par certains peuples germaniques qu'après plusieurs hésitations. Dans la logique barbare, le successeur d'un roi chrétien pouvait également apostasier sans difficulté, au plus grand effroi des ecclésiastiques. Les Burgondes et les Suèves changèrent ainsi respectivement trois et cinq fois de religion.

Une fois le peuple converti, il s'agissait d'encadrer la religion populaire afin d'éviter la prolifération de ce que saint Augustin appelait les «semi-chrétiens», ces individus qui avaient reçu le baptême mais dont l'orthodoxie s'avérait douteuse, parasitée qu'elle était par des éléments païens. Le contrôle social des croyances se renforça avec l'apparition de l'excommunication et de la pénitence. Les conversions furent facilitées par l'action vigoureuse des moines, qui n'hésitaient pas à avoir recours à un surnaturel menaçant pour terrifier les populations, ainsi que par les élites locales.

Une société chrétienne naissait peu à peu, et les dirigeants séculiers et religieux se mirent à collaborer pour faire avancer l'uniformisation religieuse de leurs royaumes respectifs. Vers le milieu du VIIe siècle, les païens et les hérétiques avaient disparu. Au tout début du VIIIe siècle, l'Occident était devenu chrétien. Lorsque les Francs partirent à la conquête des royaumes septentrionaux, ils n'admirent plus d'avoir des sujets païens, et l'évangélisation des peuples extérieurs prit des formes militaires et coercitives contraires à l'Evangile. Elles furent pourtant justifiées par le pape et les clercs. La mission armée était née.

Les Racines chrétiennes de l'Europe. Conversion et liberté dans les royaumes barbares, Ve-VIIIe siècle, par Bruno Dumézil, Editions Fayard, 804 pages.

© Le Temps, 2006

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15 janvier 2006 7 15 /01 /janvier /2006 18:26

LYON CAPITALE DES GAULES

C'est en 43 av J-C que Lucius Munatius Plancus fonda une nouvelle colonie militaire pour abriter les citoyens romains chassés de Vienne par les populations allobroges (peuple habitant le Dauphiné et la Savoie). L'emplacement initiale fut la colline de Fourvière. Lyon peut revendiquer la date la plus haute d'une fondation en Gaule (elle est attestée par des textes antiques : une inscription au mausolée de Plancus). On lui donna le nom de LUGDUNUM ("la forteressse du Dieu Lug", dieu celte irlandais). La volonté impériale d'en faire une capitale entraîne le développement rapide de la ville sous le règne d'Auguste le célèbre Empereur. Devenue carrefour des grandes voies romaines de l'Occident, elle est, dès cette époque, capitale des Trois-Gaules.

Au IIème siècle après J-C, Lugdunum atteignit son apogée. Sa population était alors de 200 000 habitants. La cité était en fait composé de 3 villes : Fourvière, la ville romaine ; Condate, la ville gauloise ; et L'Ile des Canabae (actuelle presqu'île), la ville commerciale. Dès la fin de la période romaine, la ville s'installe au bas de Fourvière, entre ses remparts. C'est une période de régression pour Lyon qui subit les invasions barbares. Cependant, les martyrs célèbres de 177 (Pothin, Blandine, Irénée) ont contribué au développement de la nouvelle religion chrétienne qui marquera la ville tout au long de son Histoire.

Première cité épiscopale de Gaule, c'est au XIème siècle qu'elle se réveille. L'archevèque de Lyon devient primat des Gaules à partir de 1079. Commence alors la construction de nombreux édifices religieux.

Avec la Renaissance la ville retrouve sa prospérité. A partir de 1420, le Roi de France qui affirme son autorité par rapport à la "commune" institue des foires importantes et régulières. Lyon redevient le centre de commerce du pays. L'imprimerie, vers la fin du XVème, lui donnera une nouvelle vocation. En même temps, à cause (ou grâce) aux guerres d'Italie, elle devient la capitale du royaume (excuser du peu...). A partir de 1563, l'installation des tisseurs en soie entraîne la naissance d'une industrie qui ne fera que se développer jusqu'au début du XXème siècle. En 1562, la ville tombe aux mains des protestants qui saccagent de nombreux édifices religieux. En 1595, l'entrée d'Henri IV à Lyon marque à la fois la fin de cette période troublée et de l'indépendance politique de la ville...

Au XVIIIème siècle, le renom de la soirie lyonnaise atteint l'Europe entière ! La Fabrique ne cesse de croître faisant de Lyon la première concentration ouvrière de la France de l'Ancien Régime. Au cours du Siècle des Lumières, la vie intellectuelle est intense et des inventeurs (Vaucason, Jouffroy d'Abbans, Mongolfier) y réalisent leurs créations. Ce siècle inaugure les transformations urbaines qui donneront à la cité son visage actuel. Puis vient la Révolution qui va marquer profondément Lyon. La ville qui reste tout entière à la cause du Roi se trouvera en état de siège. Le 9 octobre 1793, la Convention ordonne aux troupes révolutionnaires de s'emparer de la ville et la condamne à la destruction qui ne sera en fait que partielle. Mais la répression fut terrible ; l'armée soit-disant "Républicaine" n'hésita pas à tirer sur les prisonniers au canon...

L'avènement du Premier Empire permet à Lyon de renouer avec son passé. Il annonce une renaissance, confortée par la prospérité industrielle. Mais l'augmentation du nombre des métiers à tisser déclenche les premières luttes sociales en 1831, la révolte des Canuts (qui ont pour devise : "vivre en travaillant, mourir en combattant").

Le XIXème siècle voit naître des savants et des inventeurs de renom (Cl. Bernard, Ampère, les frères Lumières). Dans le domaine artistique c'est la peinture qui se distingue par son abondance.

Pendant la première moitié du XXème siècle, deux personnalités vont marquer Lyon : Edouard Herriot (maire de 1905 à 1957) et Tony Garnier (célèbre architecte). Lors de la Seconde Guerre Mondiale, Lyon qui reste en zone libre jusqu'en 1942, devient (une fois de plus) la capitale de la Résistance française (avec son mythe Jean Moulin...). Tandis que les Allemands détruisent tous les ponts sauf un, les américains bombardent Vaise et la Guillotière (je crois que vu les populations qui se sont aujourd'hui installées dans ces quartiers, un retour des B-52 serait le bienvenue...). Après la guerre, l'évènement majeur qui va marquer la ville fut sans doute la construction dans sa banlieue de nombreuses "cités dortoirs" qui deviendront, comme tout faf le sait, des zones de non-droit ou territoires occupés...

De nos jours, le fait le plus marquant fut en 2001 l'élection (avec Paris et Marseille) d'un maire (ou d'une mairesse, chacun voit) gay (mais triste pour nous...) dans notre si belle ville de Lugdunum... Lyon qui laissera une empreinte éternelle dans l'Histoire de France et qui fut de nombreuses fois la CAPITALE (de la résistance à toutes sortes d'invasions) du pays, deviendrait-elle aujourd'hui la capitale des soumis et des sodomites ?? Mais comme disaient Brennus et ses guerriers après la prise de Rome : "VAE VICTIS !" (malheurs aux vaincus !).

Yanndarc

Article paru dans les n°11 (juin 2002) et n°12 (oct/nov 2002) de "Vaincre!"

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4 janvier 2006 3 04 /01 /janvier /2006 19:11

Les Européens en Chine

En juillet 1996, deux étudiants qui pataugeaient dans la rivière Columbia, à Kennewick dans l’Etat de Washington, trébuchèrent sur les restes du squelette d’un Européen mâle d’âge adulte. Tout d’abord les anthropologues supposèrent qu’il s’agissait d’un pionnier mort à la fin du 19ème siècle. Mais la datation au radiocarbone montra que le squelette était âgé d’environ 9300 ans. En fait, «» est la dernière d’une série de découvertes d’anciens squelettes, qui tendent à confirmer la théorie que quelques-uns des premiers habitants de l’Amérique du Nord étaient des Européens, qui émigrèrent à partir du continent eurasiatique par un pont de terre à travers la Mer de Bering vers la fin de la dernière ère glaciaire, il y a environ 12 000 ans. Le Docteur Robert Bonnischen, directeur du Centre pour l’Etude des Premiers Américains, à l’Université de l’Etat de l’Oregon, pense que «l’Homme de Kennewick» jette le doute sur l’exactitude du terme «Paléo-Indien», qui est habituellement utilisé pour décrire cette période de la préhistoire américaine. «Peut-être que certains de ces types étaient précisément des Paléo-Américains», admet-il.
Bien sûr, de tels faits posent un problème majeur à la version «politiquement correcte» de l’histoire, qui encourage l’idée selon laquelle les Américains Blancs ont honteusement volé leur pays aux Indiens. Il n’est donc pas surprenant qu’on aie tenté de dissimuler au public les faits concernant «l’Homme de Kennewick». Encouragés par le gouvernement Clinton, les Indiens Américains ont réclamé le squelette, invoquant une loi fédérale de 1990 qui assure la protection de leurs sites funéraires. Leur intention déclarée était de l’enterrer immédiatement dans un endroit secret, et d’empêcher ainsi de futurs examens scientifiques et des tests ADN. Cependant, huit anthropologues américains, clamant que les Indiens et le gouvernement fédéral craignent les implications de la découverte, ont entamé une action juridique en octobre 1996, pour empêcher tout enterrement secret du squelette.

En fait, «l’Homme de Kennewick» est un élément nouveau et important, qui s’ajoute à un ensemble d’indications qui suggèrent que pendant la période du Haut-Paléolithique, entre — 10 000 et — 35 000 environ, les Blancs — c’est-à-dire des hommes semblables aux Européens modernes — ne vivaient pas seulement en Europe, mais aussi dans une zone s’étendant de l’Asie du nord jusqu’au Pacifique. En Sibérie et dans d’autres régions orientales ils furent finalement refoulés et absorbés par des peuples mongoloïdes, bien que des poches isolées de gènes européens aient survécu jusqu’à nos jours en Asie du nord. Le peuple métissé des Aïnous au Japon en est un exemple.


La crédibilité de cette théorie a été spectaculairement renforcée dans les dernières années par la découverte remarquable de plus d’une centaine de corps d’Européens naturellement momifiés, vieux de 2400 à 4000 ans, dans la région du bassin du Tarim [70 km à l’ouest de l’ancien lac du Lop Nor, NDT], en Chine de l’ouest. Etonnamment bien préservées par le climat aride de la région, ces momies témoignent de l’existence d’un peuple de type nordique, avec une culture avancée, splendidement habillé avec des tuniques, des pantalons, des bottes, des bas, et des chapeaux. Dans une grande tombe, les corps de trois femmes et d’un homme furent découverts. L’homme, âgé d’environ 55 ans à sa mort, était d’une taille d’au moins 1m80 et avait des cheveux châtain clair qui étaient en train de blanchir. L’une des femmes les mieux préservées était d’une taille de 1m80, avec des cheveux châtain clair tressés en nattes. [Illustrations ; ci-dessus : le Sinkiang (Tuskestan chinois), plus grande province de Chine, où se trouve le site du bassin du Tarim. Ci-dessous : un Européen de grande taille, aux cheveux clairs, enterré il y a 3000 ans en Chine de l’ouest. Les corps momifiés de douzaines de ses congénères ont été découverts dans la même région.]


Parmi les objets découverts avec les corps se trouvaient des manteaux de fourrure, des gants de cuir, et un miroir décoré, alors que les femmes avaient des sacs contenant des petits couteaux et des herbes, probablement à usage médicinal. A Cherchen, dans le sud du désert de Takla Makan, on découvrit le corps momifié d’un enfant, probablement âgé de guère plus de trois mois à sa mort, enveloppé dans de la laine brune, et les yeux recouverts de petites pierres plates. A côté de sa tête il y avait une coupe à boire faite dans une corne de bovidé, ainsi qu’un «biberon» fait d’une mamelle de brebis, qui avait été coupée et cousue pour pouvoir contenir du lait. Une momie mâle portait même les traces d’une opération chirurgicale sur son cou, les incisions ayant été recousues avec du crin de cheval.

En fait, plusieurs momies de type européen avaient déjà été découvertes dans la région du bassin du Tarim au début de ce siècle, l’une d’entre elles ressemblant à une femme celte, et une autre à un vagabond bohémien. Toutes étaient habillées de beaux vêtements, incluant un chapeau avec des plumes, ayant une ressemblance frappante avec les coiffures alpines encore portées de nos jours dans les Alpes. Mais ces premières découvertes, vieilles d’environ 2000 ans, furent rejetées comme étant des corps d’Européens isolés qui s’étaient égarés dans cette région, et elles furent ainsi considérées comme n’ayant pas de signification culturelle ou historique. (photos)

En effet, les spécialistes modernes, en accord avec la mode de l’Histoire «politiquement correcte», ont eu tendance à nier les preuves de tout contact ou échange précoce entre la Chine et l’Ouest pendant cette période, considérant le développement de la civilisation chinoise comme une affaire essentiellement intérieure, coupée de toute influence extérieure. Plus encore, toute diffusion de peuples ou de culture était supposée avoir eu lieu de l’est vers l’ouest, les Européens ayant été civilisés par les Chinois. L’éminent spécialiste de la Préhistoire Gordon Childe, par exemple, résuma en 1958 la Préhistoire européenne comme étant l’histoire de «l’irradiation de la barbarie européenne par la civilisation orientale». (1)

Mais les dernières momies découvertes dans le bassin du Tarim sont trop nombreuses, trop anciennes, et trop riches d’enseignement, pour pouvoir être rejetées de cette manière. [Cependant, ces découvertes n’ont été connues du grand public qu’à partir du milieu des années 90, alors que les premières momies ont été découvertes à partir de 1978-1980, NDT.] Et, plus important, elles ont aidé à rouvrir le débat à propos du rôle que les Européens ont pu jouer dans les origines de la civilisation en Chine, quelques archéologues recommençant à arguer que les Européens pourraient bien avoir été à l’origine de l’introduction en Chine d’éléments de base tels que la roue et les premiers objets en métal. Cela renforce sérieusement les théories qui furent proposées au début du siècle, mais qui furent ultérieurement enterrées sous une avalanche de pensée «politiquement correcte». En 1912 par exemple, un universitaire réputé de Cambridge, A.C. Haddon, nota dans The Wanderings of Peoples la possibilité que l’élément civilisateur de la vieille civilisation chinoise aurait pu être introduit par la migration d’un peuple plus cultivé venant de l’ouest.

A présent, selon le Dr Han Kangsin, un anthropologue de l’Institut d’Archéologie de Pékin, l’existence des squelettes et des momies souligne clairement le fait que les premiers habitants de la région du bassin du Tarim étaient des Blancs, apparentés aux Cro-Magnons de l’Europe paléolithique. Cette théorie est soutenue par le Dr Victor Mair, spécialiste des anciennes langues et cultures asiatiques à l’Université de Pennsylvanie, qui encouragea la principale expédition qui découvrit les momies. Il est devenu le principal avocat de la théorie selon laquelle des groupes importants d’Européens étaient présents dans le bassin du Tarim longtemps avant les actuels habitants de la région, suggérant que les peuples turcophones n’arrivèrent pas dans cette région avant le 8ème siècle av. JC environ. Ultérieurement, pense-t-il, les nouveaux venus chassèrent les Européens, encore que le principal groupe ethnique de la région aujourd’hui, les Ouïgours, compte parmi ses membres des individus avec des cheveux et un teint inhabituellement clairs.

En réalité, la preuve de l’existence d’un peuple indo-européen, à présent disparu, qui vivait en Asie centrale, existe depuis longtemps. Les membres de ce peuple sont connus sous le nom de Tokhariens, et sont décrits plus précisément sous le nom de Arsi, qui est apparenté au sanscrit Arya et au vieux-persan Ariya, signifiant Aryen : «ce qui est noble et digne». Leur langue, qui présente des similarités avec les branches celtiques et germaniques du tronc commun indo-européen, est conservée dans des manuscrits datés entre le 6ème et le 8ème siècles après JC, et de solides preuves de son existence peuvent être trouvées aussi loin qu’au 3ème siècle.

En dépit du fait que des manuscrits tokhariens ont été trouvés seulement pour la période la plus récente, les linguistes ont occasionnellement identifié des mots tokhariens dans des manuscrits écrits en gandhari prakrit, une langue vernaculaire du nord-ouest de l’Inde qui était utilisée comme langue administrative dans une grande partie du bassin du Tarim du 3ème au 5ème siècle après JC. Les Tokhariens étaient aussi connus antérieurement sous le nom de Yue-zhi (ou Ru-zhi), qui sont cités dans des textes chinois datés du 5ème siècle après JC, dans les limites d’ancienneté définies par la datation des momies du bassin du Tarim.

Les Tokhariens sont représentés de manière frappante sur des peintures murales à Kizil et Kumtura (non loin de la ville chinoise de Ku-Che, dans les montagnes du Tien Shan au nord du bassin du Tarim) comme des Européens d’allure fière, de grande taille, avec des cheveux roux ou blond-roux, nettement divisés au milieu, des longs nez, des yeux bleus ou verts, des visages allongés. Les Yue-zhi du premier siècle avant JC sont aussi décrits dans des statues peintes à Khalchayan (à l’ouest de la rivière Surkhan, dans l’ancienne Bactriane). Eux aussi sont dépeints comme des Européens avec des longs nez, des visages fins, des cheveux blonds, la peau rose, et des yeux bleus clairs. On sait par des sources historiques que pendant le 2ème siècle av. JC, les «grands Yue-zhi» se déplacèrent du nord-ouest de la Chine jusqu’à Ferghana et la Bactriane, qui se trouve sur le flanc le plus éloigné du Pamir. A partir de là ils partirent au sud à travers l’Hindou Kouch vers l’Afghanistan et la partie nord du subcontinent indien, où ils fondèrent le puissant empire Kushan. Ce dernier, en retour, étendit à nouveau son pouvoir jusqu’au bassin du Tarim, et avec lui se répandit le Bouddhisme, qui atteignit finalement la Chine.

«Les nouvelles découvertes obligent à un réexamen des vieux livres chinois qui décrivent des individus historiques ou légendaires, de grande taille, avec des yeux bleus ou verts, de longs nez, de grandes barbes, et des cheveux roux ou blonds. Les spécialistes ont traditionnellement raillé ces récits, mais il semble maintenant qu’ils pourraient se révéler exacts.» (Victor Mair)

Une hypothèse qui rencontre une faveur croissante est que la migration de ces Indo-Européens commença avec leur invention du chariot à roues. Travaillant avec des archéologues russes, le Dr David W. Anthony, anthropologue au Hartwick College à New York, a découvert des débris de roues de chariots dans des tumulus funéraires vieux de 5000 ans, dans les steppes de la Russie du sud et du Kazakhstan. Cette série d’investigations a un rapport direct avec la question des momies européennes en Chine, parce que des roues en disque, formées de trois pièces, similaires à celles qui ont été découvertes en Asie de l’ouest et en Europe, datées du 3ème et du 2ème millénaire av. JC, ont été découvertes dans le désert de Gobi, au nord-ouest du bassin du Tarim. De même, des roues à rayon datant du début du 2ème millénaire av. JC ont été mises à jour dans un autre site non loin de là.

La plupart des chercheurs acceptent à présent la thèse selon laquelle le lieu de naissance des véhicules tirés par des chevaux et l’utilisation des chevaux comme montures se trouvait dans les steppes d’Ukraine, plutôt qu’en Chine ou au Proche-Orient. Comme le Dr Anthony et ses collègues l’ont montré par leur étude au microscope des dents de chevaux, des chevaux étaient déjà harnachés en Ukraine il y a 6000 ans. De même, des chars de bois avec des roues à rayons ont été datées d’environ 2000 ans av. JC, dans la même région. En comparaison, les chars n’apparaissent en Chine qu’environ 800 ans plus tard. Des chevaux enterrés rituellement, similaires à ceux de l’ancienne Ukraine, ont aussi été mis à jour dans le bassin du Tarim, ainsi
que des débris de roues de véhicules faites par l’assemblage de trois planches de bois polies et parallèles. Des véhicules avec des roues à peu près identiques ont été découverts dans les plaines d’Ukraine et datées de 3000 ans av. JC.

Un grand nombre d’objets découverts dans les tombes des momies du bassin du Tarim ont fourni des preuves importantes de la domestication du cheval. Cela inclut un mors en bois et des rênes en cuir, une cravache consistant en une seule lanière de cuir attachée à un manche de bois, un morceau de bois avec des lanières de cuir, et une selle de cuir rembourrée, parfaitement réalisée. Cela semble confirmer que les momies appartenaient à une culture nomade de cavaliers, qui se répandit à partir des plaines de l’Europe de l’est. Cela renforce aussi la conviction grandissante des archéologues, que l’extension de la langue, de la culture, et du stock génétique indo-européens est peut-être liée à l’extension graduelle des techniques de domestication du cheval et des véhicules tirés par des chevaux, depuis leur région d’origine en Europe, il y a 6000 ans.

Ces découvertes ont des conséquences extrêmement importantes pour la compréhension des origines de la civilisation chinoise, puisqu’on a maintenant démontré que le char fut connu en Chine seulement vers le milieu du second millénaire av. JC, à peu près à l’époque du développement de la métallurgie du bronze et de l’écriture. Par conséquent, ces faits suggèrent que les chariots et les chars furent introduits en Chine à partir de l’ouest par les Indo-Européens. Cela démontre aussi que la pénétration européenne en Chine ne commença pas avec l’ouverture de la Route de la Soie, que les livres d’histoire datent habituellement du 2ème siècle av. JC, mais au moins 2000 ans plus tôt, au tournant du Néolithique et de l’Age de Bronze, lorsque la totalité de l’Eurasie fut reliée culturellement et technologiquement par les migrants européens.

En fait, en 1951 l’archéologue allemand Robert Heine-Geldern était déjà parvenu à montrer une série de similarités entre les techniques de la métallurgie en Europe et en Chine, vers 800 av. JC. Sa démonstration incluait de l’équipement pour les chevaux, des épées à deux tranchants, des haches et des pointes de lances, dont il situait l’origine dans les centres métallurgiques du Halstatt et du Caucase. Arguant qu’une «migration reliante» s’était déroulée depuis l’Europe à travers l’Asie, il suggéra que l’émergence de la culture des Dong en Chine du sud pourrait s’expliquer par des influences venant directement d’Europe, pendant les 9ème et 8ème siècles av. JC. (2)

Deux ans plus tard, l’archéologue russe bien connu S.I. Rudenko nota l’existence de momies ayant une apparence européenne dans les tombes royales de Pazyryk dans les monts de l’Altaï, datées des 5ème et 4ème siècles av. JC. Cette démonstration fut ultérieurement appuyée par John Haskins de l’Université de Pittsburgh, qui suggéra que les Yueh-zhi (un ancien nom chinois pour désigner les Tokhariens) de la région de Pazyryk dans l’Altaï, pourraient avoir été apparentés aux Celtes de l’Europe continentale.

Précisément, les momies du bassin du Tarim ont fourni de nouvelles preuves qui appuient la thèse de Heine-Geldern. Quelques-uns des objets trouvés avec les momies suggèrent fortement un lien avec la «période des haches à douille», caractérisée par ses haches de bronze à douille (ayant un manche de bois creux inséré du côté opposé à la lame) et d’autres objets en bronze, tels que des couteaux avec des manches en forme d’animaux. La «période des haches à douille», qui est datée d’environ — 1800 à — 1000, s’est étendue sur toute l’Europe et cadre bien avec certains aspects de la culture du cheval et du char, qui met l’accent sur la chasse, avec l’utilisation de différentes sortes d’arcs.

Ainsi une nouvelle crédibilité a été donnée à des théories précédemment ignorées et ridiculisées, à propos des origines et du développement de la civilisation en Chine. A la lumière de ces nouvelles découvertes, Edwin Pulleyblank de l’Université de la Colombie Britannique argua récemment que l’influence européenne pourrait avoir été un facteur important pour l’unification des états chinois et l’établissement du premier empire chinois centralisé, par Chinchi Huangti en l’an 221 av. JC. Il souligne l’arrivée de l’extérieur, à la lisière de la steppe chinoise, de la technique militaire des archers montés, mentionnés explicitement pour la première fois dans les sources chinoises en l’an 307 av. JC. A l’ouest, les archers montés apparaissent avec les Scythes, étroitement apparentés aux Celtes, qui sont mentionnés pour la première fois dans les sources moyen-orientales vers l’an 800 av. JC et dont le mode de vie est décrit en détail par l’historien grec Hérodote. Ironiquement, ce fut la technique des archers montés, typique du nomadisme classique, qui domina la steppe européenne et qui rendit possible l’émergence des grands empires de la steppe des Singnou, des Turcs et des Mongols qui plus tard terrorisèrent l’Europe.

Pulleyblank suggère précisément que la technologie européenne fut copiée par les Chinois et retournée contre ses inventeurs. En effet, une analogie frappante avec l’extension de l’utilisation des archers montés aux frontières de la Chine peut être vue dans la manière dont la découverte des chevaux par les Indiens du Mexique, du fait des Espagnols, et de leur utilisation guerrière, a transformé les Grandes Plaines d’Amérique du nord au 19ème siècle. Cette théorie de l’imitation [des techniques européennes] par les peuples mongoloïdes est aussi appuyée par la présence de nombreux mots d’origine indo-européenne dans les strates les plus archaïques des langues apparentées au chinois. Cela inclut des mots comme «cheval », «traces», «charrette», «roue », et «vache», et cela aussi suggère que ce furent les Européens qui apportèrent tout cela en Chine.

Les échantillons de textiles, datés de la fin du second millénaire av. JC, découverts dans les tombes du bassin du Tarim, fournissent aussi la preuve de la diffusion de la technique sophistiquée des Européens jusqu’en Chine. L’un des fragments était une pièce de tissu en laine avec un dessin à carreaux, nécessitant l’utilisation d’un fuseau à tisser qui n’a jamais été associé auparavant avec la Chine ou l’est de l’Asie à une date aussi reculée. Irene Good, spécialiste de l’archéologie du textile à l’Université de Pennsylvanie, a confirmé que le dessin des carreaux était virtuellement identique, sur les plans stylistique et technique, aux pièces de textiles découvertes en Autriche et en Allemagne sur des sites datant d’une période un peu plus tardive.

Le Dr Elizabeth J.W. Barber, linguiste et archéologue à l’Occidental College de Los Angeles, et auteur de Prehistoric Textiles (Princeton University Press, 1991), confirme que les Chinois n’utilisèrent pas et ne connurent même pas le fuseau à tisser, mais en eurent connaissance par l’influence de l’ouest, et seulement après la période des Han. Il est significatif qu’il y ait de nombreuses ressemblances entre les momies du bassin du Tarim et «l’Homme des glaces» [le fameux « Ötzi», NDT], vieux de 5000 ans, découvert en 1991 dans les Alpes autrichiennes. Cela inclut le type et le style des vêtements, les objets personnels, le symbolisme religieux solaire, et les tatouages magiques ou décoratifs, ainsi que le type racial distinctif.

Ces découvertes semblent par conséquent confirmer de plus en plus l’existence d’une culture celtique s’étendant à travers l’Eurasie, il y a au moins 4000 ans. Comme l’a souligné James Opie, universitaire spécialiste des instruments en bronze et des motifs décoratifs sur les anciens textiles, il est hautement significatif que les entrelacs celtiques, les svastikas, et les motifs à thème animalier, aient été découverts depuis l’Europe, à travers l’Iran, jusqu’à la Chine. La religion des Celtes archaïques — ainsi que celle des Scythes — était une religion solaire, et les svastikas à trois ou quatre branches utilisées comme symboles solaires sont des éléments omniprésents dans l’art celtique. De même, les Européens du bassin du Tarim montrent un net penchant pour les spirales solaires, les tatouant sur leurs visages et les gravant sur les brides de leurs chevaux. Cela en soi suggère qu’il s’agissait de Nordiques, qui furent et qui ont toujours été des adorateurs du Soleil et du Ciel, et plus généralement de la Nature. Comme l’a dit le Dr Michael Puett, historien des civilisations d’Asie de l’est à l’Université de Harvard, les momies du bassin du Tarim révèlent clairement un processus de diffusion culturelle depuis l’Europe, vers l’extérieur.

Tout cela renforce la thèse du pionnier de l’archéologie, Colin Renfrew, qui contesta l’idée précédemment admise que la culture préhistorique commença au Proche-Orient ou en Asie centrale, et fut «diffusée» seulement plus tard vers l’Europe «barbare». Ces nouvelles découvertes confirment que les préalables culturels à la civilisation sont beaucoup, beaucoup plus anciens en Europe qu’on le croyait, et suggèrent que loin que l’Europe ait été civilisée depuis l’extérieur, ce fut plutôt le reste du monde, incluant l’Asie, qui fut civilisé par les colons européens. (3)

1. V. Gordon Childe, Antiquity, 32 (1958), 70

2. J. P. Mallory, In Search of the Indo-Europeans (Londres 1989), 59.

3. Colin Renfrew, Before Civilization (New York 1974).

Supplément bibliographique

Bruno Birolli, dans Le Nouvel Observateur, 23 mai 1996. (Un des seuls journaux français à avoir fait état de cette découverte.)

Alain de Benoist, dans Nouvelle Ecole, N° 49, 1997, p. 36-38.

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2 décembre 2005 5 02 /12 /décembre /2005 19:13

 

 Bataille de Vienne

La civilisation européenne, combattante, se sauve du péril ottoman

 

L'union des princes européens a sauvé notre civilisation du danger mortel que constituait l'Empire ottoman en reprenant Vienne, encerclée par les troupes innombrables de Kara Moustapha. Un siècle et demi auparavant, Vienne avait été assiégée une première fois. Le Roi d'Espagne s'était rangé du côté des Autrichiens. De même à l'époque de la Bataille navale de Lépante, l'Espagne et le Saint-Empire avaient fait cause commune contre l'invasion barbare des Ottomans.

Le scénario politico-militaire de la seconde moitié du 17ème siècle était inquiétant, les guerres se succédaient et aucune paix ne semblait se dessiner à l'horizon; ce fut un siècle terrible, un siècle de malheurs, qui a marqué l'Europe à jamais. La Guerre de Trente Ans (1618-1648) avait commencé comme une guerre de religions mais s'était poursuivie par un conflit entre la maison royale de France, les Bourbons, et les Habsbourgs. Ces derniers finiront pas conserver leur hégémonie sur l'Allemagne, centre de l'Europe, et par assumer l'autorité impériale romaine-germanique, seule légitime. Pour contester l'hégémonie habsbourgeoise sur le Saint-empire, le ministre français Armand du Plessis, Cardinal-Duc de Richelieu (1585-1642), inaugure une politique de rébellion ouverte contre la légitimité impériale en forgeant des principes d'action politique axés sur les seuls intérêts nationaux français au détriment des intérêts de l'Europe catholique. Richelieu s'allie ainsi avec les princes rebelles protestants.


Les Traités de Westphalie de 1648 sanctionnent l'affaiblissement définitif du Saint Empire Romain en Allemagne, territorialement mutilé et divisé entre catholiques et protestants, fractionné politiquement; en Europe, le Roi de France Louis XIV (1638-1715) détient une hégémonie de fait. Le rôle prépondérant qu'il joue sur le continent induit le "Roi-Soleil" à briguer la couronne impériale et, dans cette perspective, il n'hésite pas à s'allier avec les Ottomans, se montrant totalement indifférent à tout idéal européen et catholique. Le résultat de cette alliance calamiteuse et de cette trahison sans vergogne a provoqué la ruine de l'Europe, a perpétué des divisions religieuses inutiles, a affaibli l'ensemble civilisationnel européen par des luttes dynastiques tout aussi inutiles, le tout sur fond d'une crise économique et d'un déclin démographique, conséquences de la guerre. L'Europe était donc particulièrement vulnérable au lendemain de la Guerre de Trente Ans.

 

L'offensive turque

 

L'Empire ottoman, qui avait déjà conquis les pays balkaniques et s'était installé dans la plaine hongroise, avait été toutefois contenu dans ses tentatives d'expansion, le 1 août 1664, par les armées impériales commandées par le Lombard Raimundo Montecuccoli (1609-1680) à la Bataille de Saint-Gotthard en Hongrie.

Mais rapidement, les Ottomans se remettent de cette défaite, sous l'énergique impulsion du Grand Vizir Kara Moustapha (1634-1683) et reprennent leurs offensives, encouragés inconsciemment pas la politique de Louis XIV, résolument anti-habsbourgeoise, et par la faiblesse du Saint-Empire et de l'Europe toute entière.

Seule la République de Venise combattait efficacement les Ottomans à l'époque, le long des côtes de l'Egée, en Grèce et en Dalmatie. Ce fut un combat impavide et glorieux, la dernière guerre que la Sérénissime République mènera en tant qu'Etat indépendant. Cette guerre s'achèvera par la chute de Candia en 1669, défendue héroïquement par Francisco Morosini, dit du Péloponnèse (1618-1694).

Après la Crète, la Podolie, partie de l'actuelle Ukraine, est arrachée en 1672 à la Pologne et, en janvier 1683, à Istanbul, les étendanrds de guerre sont tournés vers la Hongrie. Une immense armée se met en marche en direction du coeur de l'Europe, sous le commandement de Kara Moustapha et du Sultan Mehmet IV (1642-1693), dont les intentions étaient claires : créer une "grande Turquie européenne et musulmane" dont la capitale serait Vienne.

Les forces impériales, peu nombreuses et appuyées seulement par les milices urbaines et rurales hongroises, commandées par le Duc Charles V de Lorraine (1643-1690), tentèrent de résister mais en vain. Le grand chef de guerre lorrain, au service des Habsbourg, a accepté cette mission difficile, malgré qu'il était convalescent et sortait à peine d'une grave maladie qui l'avait quasiment amené au seuil de la mort, dont, dit-on, l'avait sauvé les prières d'un capucin, le vénérable Marco d'Aviano (1631-1699). Ce prêtre italien, envoyé par le Saint Père auprès de l'Empereur, était un prédicateur infatigable, qui ne cessait de prêcher la croisade contre les Turcs, conseilla aux militaires impériaux de placer l'image de la Mère de Dieu sur les insignes des armées du Saint Empire. C'est pourquoi les bannières militaires autrichiennes ont porté toutes l'effigie de la Vierge pendant plus de deux siècles et demi, jusqu'au jour où Adolphe Hitler (1889-1945) les a fait retirer.

 

Les cloches sonnent pour avertir l'Europe du danger turc

 

Le 8 juillet 1683, l'armée ottomane quitte la Hongrie et s'avance en direction de Vienne, installe son campement autour de la ville le 13 et commence le siège. Pendant la progression de cette armée, les régions traversées sont dévastées, les villes et les fermes sont mises à sac, les églises et les monastères détruits, les populations autochtones de confession chrétienne sont soit massacrées soit réduites à l'esclavage.

L'Empereur Léopold I (1640-1705), après avoir confié le commandement militaire de la place de Vienne au Comte Ernst Rüdgier von Starhemberg (1638-1701), quitte la ville et s'installe à Linz pour organiser de là la résistance des peuples germaniques au péril mortel qui fond sur elles.

Dans tout l'Empire, les cloches sonnent à toute volée pour signaler l'arrivée des Turcs, comme en 1664 et un siècle auparavant. Alors commence la mobilisation de toutes les ressources du Saint Empire, tandis que l'Empereur négocie fébrilement pour faire convoquer tous les Princes, catholiques comme protestants. Cette initiative est lâchement torpillée par Louis XIV et par Frédéric Guillaume de Brandebourg (1620-1688). Il sollicite l'intervention immédiate de l'armée polonaise, invoquant la nécessité suprême de sauver l'Europe (chrétienne).

 

Le Pape Innocent XI

 

A ce moment dramatique de l'histoire européenne, la politique continentale et orientale préconisée depuis plusieurs années par le Saint Siège, surtout grâce au Cardinal Benedetto Odescalchi (1611-1689), élu Pape sous le nom d'Innocent XI en 1676 et béatifié en 1956 par le Pape Pie XII (qui occupa le Saint Siège de 1939 à 1958).

Se posant comme le gardien du grand esprit des croisades, le Pontife énergique, qui fut auparavant Cardinal-Gouverneur de Ferrara et avait gagné le titre de "Père des pauvres", avait amorcé une politique prospective, visant à créer un système d'équilibres entre les princes chrétiens pour permettre à sa politique extérieure, hostile à l'Empire ottoman, de se consolider. Pour y parvenir, il s'est servi d'hommes habiles, capables de décision, comme les nonces Obizzo Pallavicini (1632-1700) et Francisco Buonvisi (1626-1700), du Vénérable Marco d'Aviano et d'autres. La diplomatie pontificale s'était posée en médiatrice conciliante entre les antagonismes européens, amenant la paix entre la Pologne et l'Autriche, favorisant tous les rapprochements possibles avec le Brandebourg protestant et la Russie orthodoxe, allant jusqu'à défendre les intérêts des protestants hongrois face à l'épiscopat local, car, à ses yeux, toutes les divisions qui traversaient l'Europe chrétienne devaient s'estomper et disparaître au profit d'une unité combatttante face au péril islamique. Malgré les échecs, les querelles et les incompréhensions, en 1683, année dite "des Turcs", le Pape avait réussi à devenir l'âme de la grande coalition chrétienne, donnant de l'argent à toute l'Europe pour financer les troupes des grands et des petits princes, payant personnellement un détachement de cosaques pour l'armée polonaise.


Le siège de Vienne

 

 

 

Pendant ce temps, à Vienne, submergée par les réfugiés, commence le "chemin de croix" que constitue le siège. La ville tiendra, héroïquement. Six mille soldats et cinq mille miliciens urbains, isolés du reste du monde, vont s'opposer à une immense armée ottomane, soutenue par 300 canons. Toutes les cloches de la ville sont réduites au silence, sauf celles de la Cathédrale Saint Etienne, que l'on appelle l'Angstern, l'"angoisse", qui, de ses battements incessants, convie les défenseurs à exécuter leurs tâches. Les assauts contre les murailles de la ville, les batailles au corps à corps se succèdent jour après jour et chaque jour semble être le dernier... mais les secours sont en route. Avec la bénédiction du Pape et sous la direction de l'Empereur, qui prend la tête de ses armées, les troupes impériales avancent à marches forcées vers la ville assiégée. Le Roi de Pologne Jean III Sobieski (1624-1696) se joint à elles, car, par deux fois déjà, il a sauvé la Pologne des Turcs. Finalement, le 31 août il opère sa jonction avec les troupes du Duc Charles de Lorraine, qui exerce le commandement suprême. Quand Impériaux et Polonais ont conjugué leurs forces, l'armée chrétienne-européenne marche enfin sur Vienne, où la situation est vraiment dramatique. Les Turcs ont ouvert des brèches dans les murailles et les défenseurs survivants, après avoir repoussé dix-huit attaques et effectué vingt-quatre sorties, sont totalement épuisés. Les janissaires ne cessent d'attaquer, exaltés par les imams. Les cavaliers tatars ravagent l'Autriche et la Moravie. Le 11 septembre, Vienne vit dans l'angoisse : elle a l'impression qu'elle vit ses dernières heures de liberté. Le Comte Starhemberg envoie à Charles de Lorraine un ultime message désespéré : "Ne perdez pas de temps, mon très clément Seigneur!".

 

La bataille

 

Le matin du 12 septembre 1683, le Vénérable Marco d'Aviano célèbre la messe et le Roi de Pologne y fait fonction d'acolyte. Il bénit ensuite l'armée massée à Kahlenberg près de Vienne : 65.000 soldats européens-chrétiens vont affronter sur un champ de bataille 200.000 Ottomans.

Les princes de Bade et de Saxe, les Wittelsbach de Bavière, les seigneurs de Thuringe et du Holstein sont présent à la tête de leurs troupes; viennent ensuite les Polonais et les Hongrois, le Général Comte italien Enea Silvio Caprara (1631-1701) ainsi que le jeune Prince Eugène de Savoie (1663-1736) qui va connaître son baptême du feu.

La bataille va durer toute la journée et se terminer par une terrible charge à l'arme blanche, conduite par Jean Sobieski en personne; elle met les Ottomans en fuite et donne la victoire à l'armée européenne. Celle-ci ne perd que deux mille combattants, tandis que les Ottomans doivent en déplorer 20.000. L'armée du Sultan prend la fuite en désordre, abandonnant son butin et son artillerie, après avoir massacré les prisonniers et esclaves chrétiens. Le Roi de Pologne envoie au Pape les bannières capturées, en les accompagnant de ces paroles : "Veni, vidi, Deux vincit" ("Je suis venu, j'ai vu et Dieu a vaincu"). Par décision du Pape Innocent XI, le 12 septembre est dédié au "Plus saint Nom de Marie", en souvenir et en remerciement de la victoire.

Le jour suivant, l'Empereur entre dans Vienne, joyeuse et libérée, à la tête des princes du Saint Empire et des troupes confédérées. Il assiste au Te Deum d'action de grâces en la Cathédrale Saint Etienne, où officie l'évêque de Vienne-Neustadt, qui fait fonction de Cardinal, le Comte Léopold-Charles Kollonic (1631-1707), âme spirituelle de la résistance.

 

Le ressac de l'Islam

 

La victoire de Kahlenberg et la libération de Vienne sont le point de départ de la contre-offensive des Habsbourg contre les Ottomans dans l'Europe danubienne, ce qui conduira, au cours des années suivantes, à la libération de la Hongrie, de la Transylvanie et de la Croatie, permettant à la Dalmatie de se joindre à Venise. C'est le moment historique où se manifeste de la manière la plus éclatante la vocation et la mission de la Maison d'Autriche, qui consistaient à libérer et à défendre l'Europe dans le Sud-est du continent. Pour réaliser cette mission, elle a mobilisé sous la bannière impériale romaine-germanique des Allemands, des Hongrois, des Tchèques, des Croates, des Moraves, des Slovaques, des Italiens, des Roumains, des Lorrains, des Savoisiens, des Franc-Comtois, des Flamands, des Wallons, des Luxembourgeois, des volontaires irlandais et arméniens, alliés aux Polonais et aux Vénitiens. La Maison d'Autriche a pu, ainsi, créer cet Empire multi-ethnique, multi-confessionnel mais entièrement européen qui donnera à l'Europe centrale et orientale la stabilité et la sécurité jusqu'en 1918.

La Grande Alliance a donné vie aux projets du Pape Innocent XI, qui entendait s'inscrire dans la tradition d'un énergique prédécesseur, Saint Pie V (1504-1572), artisan de la victoire navale des Européens à Lépante, le 7 octobre 1571. La Bataille de Vienne constitue un tournant majeur dans l'histoire européenne, si bien qu'on peut parfaitement la comparer à la fameuse Bataille de Poitiersde 732, emportée par le chef austrasien Charles Martel (688-741), qui a arrêté l'avance des Arabes vers le Nord. Rappelons également que l'alliance reconduite en 1684, ratifiée sous le nom de Sainte Ligue, a sanctionné une alliance unique entre Allemands et Polonais, a redoré le blason de l'Empire exsangue après la Guerre de Trente Ans, a rapproché Protestants et Catholiques grâce à la clairvoyance et à la diplomatie d'un grand Pape, bien décidé à réaliser l'objectif qu'il s'était donné : libérer l'Europe des Turcs.

En cette année s'est forgée une fraternité d'armes entre tous les peuples de l'Europe christianisée, ce qui a permis une grande croisade victorieuse, qui a éliminé définitivement le danger mortel de l'ottomanisme. Force est de constater tout de même que ce danger millénaire, une fois écarté, a été vite oublié. Mais le siège de Vienne doit nous rappeler que, toujours dans nos mémoires, les cloches qui sonnent pour mobiliser l'Europe contre le péril turc et islamique ne doivent jamais cesser de sonner.

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27 novembre 2005 7 27 /11 /novembre /2005 15:46

HISTOIRE DE Rebeyne

AVANT, AVANT, LION LE MELHOR !

 

 

Novembre 1831 : pour le pain !

« Si la capitale politique avait proclamé les Droits de l’Homme. Lyon, berceau du socialisme, proclame les droits du travailleur. Paris avait crié « Vivre libre ou mourir » Lyon cria « Vivre en travaillant ou mourir en combattant » Fernand Rude, C’est nous les Canuts.

L’année 1830 s’est achevée tristement pour les ouvriers lyonnais avec l’échec de la révolte de juillet instrumentalisée par les bourgeois lyonnais pour prendre la direction des affaires du pays et de la ville. Ils n’ont pas trouvé l’amélioration de leur sort, un court instant espérée, dans les plis du drapeau tricolore symbole de la bourgeoisie. Ils ont bien conscience, en revanche, d’avoir été, une fois de plus, les dupes d’une révolution.

Les conditions draconiennes et humiliantes imposées aux chefs d’atelier créent une solidarité nouvelle avec les compagnons. Le mutuellisme (encore une invention sociale lyonnaise ! !), qui a pris un second souffle, depuis le départ de son créateur Pierre Charnier, s’est doté, depuis juin 1828, d’une structure plus réaliste, avec des loges de 20 membres (maximum permettant d’échapper aux contraintes de la législation).

Dès janvier 1831, une certaine agitation se manifeste. Des rassemblements se forment en différents points de la ville pour demander du travail et du pain. Des affiches manuscrites font leur apparition : « Le bandeau tombe enfin de nos yeux, le prestige des couleurs n’a qu’un temps et la liberté sans pain ne nourrit pas nos familles…Mes amis, nous sommes maintenant tous armés, resterons-nous dans nos familles en voyant nos familles mourir de faim ? » En février se place la pittoresque expédition de Savoie : 500 à 600 volontaires du Rhône prennent la route pour participer à un soulèvement annoncé contre le roi de Sardaigne. Ils sont arrêtés à Meximieux, refoulés sur Lyon, les meneurs arrêtés. La fraternité avec le pays savoyard mais aussi la misère sont à l’origine de cette tentative.

En avril-juin 1831, une mission saint-simonienne suscite un intérêt considérable. Une prise de conscience des injustices sociales si flagrantes, des méfaits d’une concurrence exacerbée et de l’oppression des bourgeois trouvent un large écho dans les rangs des travailleurs lyonnais. Le désarroi et la lassitude amènent d’autre part quelques lyonnais à se cramponner au chimérique espoir d’un retour de Napoléon !

La crise sournoise dont on annonçait sans cesse la fin prochaine se prolonge et les fabricants se montrent de plus en plus intraitables dans la fixation des prix de façon. L’ouvrier en soie, voit fondre ses gains et se heurte à l’inflexibilité de quelques fabricants qui jouent sur l’inévitable concurrence de ceux qui quémandent du travail pour manger et survivre ( cette muselière sociale n’a pas changée)

C’est par la diffusion d’un prospectus qui annonce la création d’un journal hebdomadaire, intitulé l’Echo de la Fabrique, que commence les évènements de l’année 1831, en parallèle se crée une « Commission centrale » et « Commission du tarif » chargée d’étudier une proposition tarifaire et de la proposer à une délégation de fabricants.

Les autorités commencent à prendre les choses au sérieux et c’est le général Roguet, commandant de la 19e division militaire qui consulte les prud’hommes pour apprécier l’utilité d’un tarif. Une fois encore, l’armée sert d’instrument de contrôle pour les bourgeois. Les fabricants se dérobent aux revendications des ouvriers lyonnais pour un tarif qui leur permettraient de vivre.

Le 18 octobre, c’est au tour du préfet Bouvier-Dumolard de prendre le relais. Il convoque les membres de la Chambre de commerce, les maires de Lyon, la Croix-Rousse, la Guillotière et Vaise pour connaître leurs avis. Ce même 18 octobre, la commission des chefs d’atelier remet au préfet la synthèse de ses travaux exprimant la volonté des tisseurs d’obtenir une amélioration de leur sort sans devoir recourir à des « voies violentes et illégales ». Toujours rien de concret ne se dégage et les ouvriers, qui commencent jà trouver le temps long, manifestent pacifiquement entre la Croix-Rousse et Jacobins.

Le 25 octobre, les fabricants et les délégués ouvriers se rencontrent, ces derniers exposent leurs revendications avec une clarté et une conviction qui font grande impression. Au dehors, des ouvriers descendus de la Croix-Rousse et en provenance des différents quartiers de la ville et des faubourgs se sont rassemblés au nombre de 5000 ; ils sont massés entre la préfecture et la place Bellecour toutes proche. Ils sont venus, silencieux et dignes, dans un ordre parfait et se sont réunis, disciplinés et attentifs. Finalement, un frémissement de joie parcourt la foule. L’information est venue de la préfecture : un tarif a été déterminé et il sera applicable le 1er novembre.

Les canuts ont obtenu ce fameux tarif qui ne leur garantit certes pas l’abondance, mais au moins une légère amélioration de leurs conditions d’existence. La foule regagne en chantant ses quartiers respectifs, des illuminations, des fêtes, des bals s’improvisent spontanément.

Hélas, les fabricants, dans une large mesure majorité, ne se sentent pas liés par le tarif. La déception est immense dans le monde de la canuserie, les excès de fièvre se multiplient, rassemblements, cris de colère, brève échauffourées. Point d’orgue d’une situation explosive : une revue de la Garde nationale, le dimanche 20 novembre, sur la place Bellecour, en l’honneur de la prise de commandement de son nouveau chef, le général Ordonneau. Depuis quelques jours, le bruit court dans la ville, d’une décision de grève des maîtres-ouvriers et ouvriers le 21. La revue se passe fort mal, les bataillons de la Garde nationale, ceux où dominent les fabricants et les riches bourgeois de la cité et ceux à majorité « canuts » s’observent avec animosité.

Le 21 novembre, dès le lever du jour, une agitation fébrile gagne toute la population de la Croix-Rousse. La plupart des métiers se sont arrêtés spontanément. Des groupes de compagnons visitent les ateliers et coupent les fils chez les opposants à la grève. Les compagnons n’ont rien à perdre, ils n’ont que leurs bras pour vivre.

Des cortèges se forment, se gonflent d’heure en heure, les tambours battent le rappel. Très visiblement, la Garde nationale de la Croix-Rousse n’a pas l’intention de s’opposer aux manifestants. Vers 10heures, un détachement de la Garde nationale lyonnaise se présente à la barrière d’octroi, au sommet de la Grand’Côte. Des quolibets sont échangés, puis des insultes, puis des menaces. Finalement une grêle de pierres s’abat sur les gardes lyonnais qui font demi-tour et dévalent précipitamment la montée de la Grand’Côte. Des escarmouches se produisent encore en différents points du plateau mais les ouvriers restent maîtres du terrain et dressent hâtivement quelques barricades.

Les émeutiers décident de former un cortège pour défiler dans Lyon, ils sont armés de façon hétéroclite avec plus de gourdins et de pelles que de fusils. Ils brandissent un drapeau noir sur lequel certains contemporains affirment avoir lu la célèbre devise « Vivre en travaillant ou mourir en combattant ». Au bas de la Grand’Côte, ils se heurtent à un peloton de la première légion de la garde lyonnaise. Des coups de feu éclatent, des hommes tombent. Trois ouvriers sont tués, plusieurs autres blessés. Les manifestants ripostent à l’aide de quelques armes et remontent précipitamment sur le plateau. Une grande partie des gardes nationaux passent à l’émeute, les autres sont désarmés sans opposer de résistance, les barricades se multiplient.

Le général Roguet décide de prendre les choses en main et s’efforce de cerner les révoltés en attaquant plusieurs barricades solidement défendues, le préfet est retenu en otage avec le général Ordonneau. Ils seront néanmoins relâchés dans la soirée.

Plus d’un millier d’hommes accourus des garnisons avoisinantes, consolide le dispositif de répression. Cependant, à la Croix-Rousse, trois à quatre cents hommes, pour la plupart armés, sont arrivés en renfort. Ce sont des ouvriers de différents corps de métier, en provenance de la Guillotière et des Brotteaux, qui ont marché toute la nuit pour se joindre à leurs frères de la soierie et lutter à leurs côtés. D’autres ouvriers arrivent aussi, par petits groupes, des localités voisines.

Ce renfort spontané marque le sommet de la révolte des canuts et lui confère la plénitude de son expression historique, son caractère identitaire. La grande solidarité des lyonnais constitue la première et éblouissante illustration d’un long combat pour la dignité et la justice. Tandis que la volonté de vaincre se raffermit chez les ouvriers, le découragement et la peur gagnent peu à peu le camp adverse.

Vers 5 heures du matin en ce mardi 22 novembre, les hostilités reprennent. Les ouvriers ont fortifié leurs positions et ils résistent victorieusement aux assauts des lignards. Solidement installés derrière leurs barricades, embusqués aux fenêtres des hautes maisons des pentes, ils infligent des pertes terribles à leurs adversaires dont le moral fléchit d’heure en heure. Dans la matinée, de nouveaux foyers d’insurrection se créent en différents points de Lyon. Les ouvriers de Saint-Just désarment le poste de la barrière, contrôlent le télégraphe optique qui, en raison du brouillard persistant, avait fort mal fonctionné les jours précédents, privant ainsi le gouvernement d’informations précises en provenance de Lyon. A partir de midi, les ponts du Rhône et de la Saône tombent sous la pression des insurgés. Le sud de la ville, mal défendu est infiltré, des barricades jalonnent la formidable poussée, des magasins d’armurerie sont pillés. L’étau se resserre autour de l’hôtel de ville. A minuit, le général Roguet décide de « quitter la position de l’hôtel de ville pour en occuper une plus avantageuse en dehors des murs ».

La retraite s’effectue à partir de 2 heures du matin, par le quai Saint-Clair, en direction du fort de Montessuy. Les insurgés sonnent le tocsin pour donner l’alerte et tirent par les fenêtres dominant le quai. Ce qui reste des troupes en retraite va trouver refuge au fort de Montessuy, puis en se dispersant, sur Rillieux et Cailloux-sur-Fontaine.

Les insurgés s’emparent de l’hôtel de ville vide, et mettent en place un « Etat Major provisoire ». Une police est hâtivement constituée et des détachements d’ouvriers se portent en différents points de la ville pour faire régner l’ordre, le respect des personnes et des biens. Un manifeste incendiaire signé par quelques volontaires du Rhône qui ont joué un rôle actif dans l’insurrection est lu et affiché dans certains quartiers. C’est un véritable appel à la déchéance des autorités constituées, tant au plan local que national, et à leur remplacement par des délégués élus par le peuple provincial, dans une tendance fédéraliste.

Dans la nuit du mercredi 23 novembre au jeudi 24 novembre, le préfet accompagné de l’adjoint Boisset, fait le tour des différents postes de la ville pour flatter les ouvriers et tenter de leur faire reconnaître l’autorité légitime. L’effervescence règne toujours néanmoins dans les rangs des ouvriers, d’autant plus que des bruits circulent quant à une éventuelle offensive du général Roguet dont les effectifs ont été considérablement renforcés. Visiblement les Canuts sont embarrassés de leur victoire et ils sont désemparés car ils ne peuvent s’appuyer sur une organisation susceptible de faire face à la situation et de canaliser leur sursaut de colère dans un sens concret.

A Paris, la chambre des députés vote une adresse au roi pour lui demander la plus extrême sévérité : « La sûreté des personnes a été violemment attaquée, la propriété a été menacée dans son principe, la liberté de l’industrie a été menacée de destruction »

Le roi délègue son fils, le duc d’Orléans et le ministre de la guerre, le maréchal Soult pour se mettre à la tête des troupes de répression. Les consignes sont précises : toute corporation d’ouvriers doit être dissoute, le désarmement doit être opéré, le tarif doit être annulé. A Lyon, les autorités reprennent confiance et n’ont qu’un seul objectif : gagner du temps, tenir les ouvriers jusqu’à l’arrivée des troupes.

La répression se prépare. Le 1er décembre, en début d’après-midi, le général de Castellane, à la tête de 800 fantassins et de 500 cavaliers, entre dans le fourbourg Saint-Just. Le 3 décembre, le duc d’Orléans et Soult font leur entrée dans la ville, à la tête d’un état-major d’apparat et d’une imposante armée. Près de 30 000 hommes occupent une agglomération de 180 000 habitants (1 fantassin pour 6 Lyonnais ! !). Ce quadrillage massif permet à Soult, quelques jours après, d’annoncer la nullité du tarif établi le 31 octobre 1831 et l’annulation de tous les livrets des ouvriers. Le gouvernement ne laisse pas passer l’occasion d’une répression féroce… .

Aujourd’hui comme hier, les Lyonnais doivent retrouver cette solidarité et cette fierté qui leurs ont permis de devenir maître de leurs destins. L’identité lyonnaise doit être ce flambeau qui éclaire notre lutte pour le respect de nos vies et de notre histoire, face au mondialisme qui veut faire de nous des marchandises malléables et serviles, le cri de nos ancêtres canuts est d’actualité « Vivre en travaillant ou mourir en combattant ». Face à nous, toujours les mêmes adversaires qu’hier, les gouvernements corrompus aux ordres des puissances financières, mais le plus dangereux reste en nous : l’esprit bourgeois.

« Nous défions qu’on nous montre quelque part un peuple affamé, méprisé, méconnu, devenant tout d’un coup, comme par miracle, maître d’une ville telle que Lyon, et la respectant. Un tel événement est peut-être le signe du plus haut degré de civilisation et de moralité auquel soit jamais parvenu un peuple » Armand Carrel

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