Selon les premières estimations de l'Agence Bio (groupement d'intérêt public pour la promotion de l'agriculture biologique) présentées ce jeudi (27 janvier), la France comptait 20 600 exploitations bio fin 2010, soit un bond de 25% par rapport à 2009 (16 446 exploitations) et de 50% par rapport à 2008 (13 298 exploitations).
En termes de surface agricole, 836 000 hectares sont désormais dédiés à l'agriculture biologique, soit une augmentation de 23,5% par rapport à 2009 (677 000 hectares). Le bio ne représente cependant encore que 2,9% de la totalité des terres agricoles françaises. Encore loin des objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement (6% en 2012, 20% en 2020). "Nous espérons approcher la barre de 4% fin 2011", a précisé Elisabeth Mercier, directrice de l'Agence Bio.
Rhône-Alpes reste championne du bio
La région Rhône-Alpes reste la première en nombre d'exploitations bio, devant le Languedoc-Roussillon. Suivent Midi-Pyrénées et l'Aquitaine, deux régions ayant enregistré le plus grand nombre de conversions au bio l'année passée. Tandis que Provence-Alpes-Côte-d'Azur, les Pays de la Loire et la Bretagne tirent également leur épingle du jeu, les régions Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Champagne-Ardenne et Haute-Normandie se situent "en bas du classement".
Augmentation de 10% des ventes
Du côté des consommateurs, les ventes de produits bio, principalement en grandes surfaces, ont augmenté de 10% l'an dernier, ce qui représente un marché de 3,3 milliards d'euros environ. "Les ménages franchissent souvent le pas lors de l'arrivée d'un enfant", a commenté Elisabeth Mercier, indiquant que les locomotives du secteur sont les fruits et légumes, les produits laitiers et les œufs. Débouché important pour les agriculteurs bio : la restauration collective. "40% des gestionnaires du secteur ont introduit du bio dans leurs repas, au moins de temps en temps. C'est modeste, mais nous nous attendons à ce que cela progresse rapidement", a ajouté Elisabeth Mercier.
Selon une étude CSA-Agence Bio, 43% des Français ont consommé des produits bio au moins une fois par mois en 2010 (contre 46% l'année précédente). Ils sont 23% a l'avoir fait une fois par semaine et seulement 5,7% tous les jours. Alors que la préservation de la santé et de l'environnement ainsi que la qualité et le goût des produits sont les principales motivations d'achat, le manque d'habitude et le prix du bio en constituent les freins majeurs.
Beaucoup de produits importés
Point noir au tableau : la proportion de produits bio importés reste importante, ce qui cadre mal avec la volonté de promouvoir des circuits courts et de proximité plus respectueux de l'environnement. Ainsi, "plus des deux-tiers des fruits et légumes bio étaient encore importés en 2009, reconnaît Elisabeth Mercier. Il s'agit pour beaucoup de fruits exotiques." "Cela reflète une insuffisance de l'offre en France, mais la proportion de produits importés diminuera avec le développement des exploitations bio en France", a estimé François Thiery, tout nouveau président de l'Agence Bio.
"Conversion des esprits" ?
Pascal Gury, vice-président de l'Agence Bio et producteur grandes cultures en Vendée, se montre lui aussi optimiste : "Il y a encore du chemin, mais nous assistons à une véritable explosion du nombre de conversions. La filière bio est désormais structurée, donc plus rassurante pour qui voudrait se convertir. Nous observons aussi depuis trois ans des prix plus stables que dans l'agriculture conventionnelle, car nous sommes moins confrontés à la spéculation et sommes plus en phase avec les prix de production. En ce qui me concerne, je ne me sens plus angoissé comme j'ai pu l'être lorsque je travaillais en conventionnel, il y a plusieurs années."
Conversion des terres, mais aussi des esprits ? Pascal Gury tempère : "Plutôt que de révolution, je préfère parler de prise de conscience des enjeux d'avenir, à la fois par les agriculteurs et par les consommateurs, notamment en termes d'environnement et de santé. Depuis quelques années, on assiste véritablement à une reconquête de l'agronomie, y compris dans les établissements d'enseignement agricole. Plusieurs lycées se spécialisent désormais dans le bio, comme à la Roche-sur-Yon (Vendée) et à Saint-Affrique (Aveyron). C'était inimaginable il y encore quelques années."
Métro 03-02-2011