La première secrétaire du PS Martine Aubry a annoncé que son parti déposerait mardi à l'Assemblée nationale "une proposition de loi" sur la question du vote, prenant au mot le ministre de l'Immigration Eric Besson, qui s'y est récemment déclaré favorable à long terme.

"Sortons des discours sur l'intégration des étrangers", a tonné Mme Aubry, lors de ses voeux à la presse. "Maintenant ça suffit, il faut agir."

Une exhortation lancée en guise de leçon au ministre et transfuge socialiste, conspué à gauche pour avoir lancé le débat sur l'identité nationale.

Secrétaire général adjoint de l'UMP, M. Besson a estimé dimanche qu'il fallait "aller à terme" vers le vote des étrangers, fixant comme horizon les "dix ans à venir". Mardi, il a confirmé sa position "à titre personnel", tout en estimant "contreproductif" d'"agiter (...) ce débat" en "période de tension".

La patronne du PS a aussi interpellé Nicolas Sarkozy, qui s'était également prononcé en faveur du droit de vote des étrangers lors de la campagne présidentielle en 2007, sans toutefois retenir cette option dans son programme.

"Le président de la République a dit qu'il y était favorable, eh bien qu'il la fasse voter (...) Nous dirons que c'est une loi portée par l'ensemble de la République française", a-t-elle assuré.

Selon Mme Aubry, "ce serait un beau signe à donner" après ces "mois calamiteux où on a essayé de nous expliquer que les immigrés étaient la cause de tous nos maux".

L'idée d'accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections locales ne date pas d'hier, puisqu'elle faisait déjà partie des 110 propositions de François Mitterrand pour la présidentielle de 1981. Une fois au pouvoir, le président socialiste avait jugé que le pays n'était pas prêt à cette réforme.

Le député UMP Thierry Mariani a reproché mardi à la gauche de "raviver les tensions" à des fins électoralistes, accusant le PS de ressortir "les vieilles ficelles qui ont fait le succès de Mitterrand".

"Ce n'est pas un sujet de réflexion ou de débat. Nous avons des priorités fortes. Cette question est importante, mais elle n'est pas aujourd'hui à l'ordre du jour", a tranché son porte-parole adjoint, Dominique Paillé, interrogé par l'AFP.

Le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer (UMP) a également estimé que "les Français n'étaient pas mûrs", tout en rappelant que cette question était déjà "résolue déjà pour les citoyens des 27 pays de l'Union européenne".

Si les Verts sont pour le vote des immigrés ou le Front national résolument contre, le sujet divise la majorité.

Plusieurs dirigeants de droite en approuvent le principe, comme Jean-Louis Borloo, même s'il insistent sur la nécessité d'une réciprocité de la part des pays d'origine.

D'autres, à l'image du patron des députés UMP Jean-François Copé, n'ont jamais caché leur "opposition totale" à cette mesure, estimant que le vote doit être "lié à la citoyenneté".

En privé, un haut responsable de parti présidentiel ne dissimule pas l'irritation suscitée par "l'initiative personnelle" de M. Besson, au moment où le débat fait rage sur une autre proposition de loi, défendue par M. Copé, contre le voile intégral.

"On se serait bien passé de la position d'Eric parce que c'est compliqué. Je comprends ce qu'il a voulu faire sur le fond, il est sincère, mais tout cela fait un peu désordre", a-t-il dit à l'AFP.

 

AFP